Qui a tué le roi du Swaziland?

Extrait

C’est au cours de ma dix-septième année que mon destin a basculé. Pourquoi Dieu Tout-Puissant m’a-t-il désignée, moi, Lindiwe, parmi 100 000 jeunes filles ? Pourquoi Sa Majesté m’a-t-elle remarquée ? Était-ce ma destinée que d’être choisie ? De connaître le luxe des Palais royaux, puis l’humiliation de la prison ? Que deviendra le fils que je porte en moi quand je ne serai plus là pour le protéger ? Tant de questions qui m’obsèdent et auxquelles je ne peux apporter de réponse… Il fait froid, très froid en cette soirée d’automne et le vent qui descend des montagnes glace mon cœur.

***

C’était le premier jour de septembre, une journée fraîche et grise, comme je les aime tant, comme nous les chérissons dans mon village des hautes terres, dans mes montagnes de brume. Nous étions 100 000 et nous avions froid. Nous n’étions pas couvertes, nous ne portions que nos courtes jupes de perles, nos bracelets et nos colliers et nous dansions en cadence, toujours plus vite, avec un couteau levé dans les airs et un lourd fagot de roseaux qui nous brisait l’épaule. Nous passions et repassions devant l’iNdlovukazi, comme un hommage toujours recommencé. Autour d’elle, se pressaient les princesses de la famille royale, magnifiques dans leurs vêtements brodés, avec leurs chevelures savamment apprêtées, ornées d’une plume rouge. Nous avancions, pieds nus dans la poussière que le vent faisait tournoyer. Et toutes nous cherchions le roi. Où était-il donc, notre iNgwenyama ? Le soleil, la voie lactée ? 100 000 paires d’yeux scrutaient la foule, l’estrade royale, là où aurait dû se trouver Sa Majesté. Et puis, après une attente interminable, il apparut enfin.